Ce qui frappe à première vue devant une œuvre de Léo Souton c’est l’étonnante maturité qui se dégage des sculptures du jeune artiste qui semble déjà avoir trouvé sa marque. On aurait d’emblée tendance à vouloir rapprocher cet art de celui de Brancusi ou de Jean Arp, sans qu’il s’y réduise pour autant. La maîtrise des courbes magnifie avec brio la matière sculptée. Le jeune sculpteur sait jouer de la malléabilité de son matériau, et offre au spectateur des visions de corps en mouvement, comme pris sur le vif, en action.
En effet, l’art de Léo Souton revêt des caractéristiques très organiques, qui nous amènent directement du côté de l’imaginaire biomorphique. La finesse et l’élégance de ces sculptures témoignent d’une recherche profonde de la morphologie du corps et de ses articulations, ainsi que d’une exploration de la sensualité sous différentes formes. De ce fait les œuvres se retrouvent dotées d’une surprenante vitalité, d’une ardeur, d’une force de vie qui semblent souligner une tension entre désir de marquer le mouvement d’une part, et retenue d’une pulsion intérieure d’autre part, que le sculpteur parvient à dompter, à contenir et à modeler – moduler – pour ne rien perdre de la beauté naturelle de l’élan originel.
Onna, 45 x 8 x 8cm
Les œuvres de Léo Souton affichent également une intelligence de suggestion remarquable. L’artiste parvient à en montrer suffisamment pour qu’on soit en mesure de reconnaître une forme, une silhouette, un membre, mais fait en sorte que cela reste toutefois assez implicite et délicat pour qu’on ne puisse vérifier notre intuition avec assurance et laisser ainsi la porte ouverte à tous les possibles. Une sorte de pudeur intimidante émane alors de tout cela, car l’on croit parfois voir se dessiner un sein, un phallus, une hanche, un coude, une épaule ou une cuisse sans pouvoir en être absolument certain. Cette œuvre repose donc sur un subtil jeu de cacher-montrer qui, osons le dire, nous fait du charme.
Taiji, 70 x 16 x 9cm
Le jeu du hasard de la cuisson met quelquefois en valeur les craquelures de la terre, et mime une peau fragile, vieillie. Parfois encore, l’artiste se décide à recouvrir ses œuvres d’un émail brillant qui gomme les marques de cuisson et ajoute à l’idée de la quête d’une beauté jeune, lisse et parfaite que l’on serait tenté, en tant que spectateur, de vouloir toucher du doigt ou bien même de caresser de la main tant la luxuriance de la surface appelle à la tendresse du geste. La lumière intense qui réfléchit sur l’émail de certaines de ces œuvres confère à celles-ci une force de séduction imparable qui renvoie fatalement le spectateur à son impuissance et à l’inaccessibilité de cette beauté nue. Car les positions, si l’on peut dire, adoptées par certaines sculptures tendent à évoquer plus ou moins explicitement l’intimité charnelle du corps qui se meut. Par ailleurs, le travail sur la rondeur et les creux, comme ce peut-être le cas dans les bas-reliefs, peut permettre, lors de l’exposition, d’orienter la sculpture en fonction d’un éclairage particulier qui trace alors de nouvelles courbes d’ombre sur l’œuvre elle-même tout en prolongeant cette dernière dans l’espace d’exposition ; comme une façon de faire porter la beauté du corps plus loin qu’elle-même en lui donnant une nouvelle forme d’existence, immatérielle cette fois.
Bas-relief, 35 x 25cm
On a envie de les voir en vrai, ces oeuvres : où?