J’AI UN LIVRE AVEC UNE PETITE FILLE QUI A UN PETIT FRÈRE
Je prends le thalys et je n’ai pas dormi
Mon père croit que je ne le vois pas parce que je ne veux pas le voir
Ma mère a oublié d’acheter le café
Mes veines gonflent à l’intérieur du métal
Il y a une fête et je la rate
J’ai un ami qui n’est plus un ami
Il a une bête qui n’est plus une bête
J’ai déjà été excitée par ma propre ombre
J’ai déjà lu un livre que tout le monde avait lu
Quand je sors de l’eau mon corps est rouge
Par la fenêtre ouverte j’entends la télévision des voisins
Je vois les gens se mettre à genoux comme pour faire des prières
*
Je n’ai jamais eu de cloque
Je fais une blague et les gens rigolent
Il y a une pierre rouge autour de mon cou
J’ai peur que tu attrapes ma maladie
Je lis les résumés des épisodes d’une série sur Wikipédia
Je porte une robe en soie noire qui ressemble à un long t-shirt
Je regarde les gens qui regardent les gens qui regardent les trains
J’ai froid parce que je n’ai pas assez dormi
Je veux que tu attrapes ma maladie
*
Je regarde les vitrines avec les gens à l’intérieur
Je parle quand il y a du bruit
Je me tais quand tout le monde m’écoute
Je n’ai jamais eu de baby-sitter
Je n’ai jamais été me promener dans une forêt avec des nouvelles chaussures parce qu’elles étaient belles
Je n’ai jamais eu de femme de ménage
Je n’ai jamais mangé de repas avec une entrée et avec un dessert
Je bégaie parce que tout le monde se tait
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J’ÉCRIS UN POÈME SUR DES PETITS CHATS
J’ai peur des morts qui sont déjà morts
Je dessine des chiffres que j’entends tous les jours
Il y a la pluie qui tombe et il n’y a rien qui pousse parce qu’il n’y a rien
Je dessine ce que je vois quand je ferme les yeux
Je vois la fumée et je ne vois pas le feu
Je m’approche du feu et je ne me brûle pas
*
Je ne mets rien sur les murs parce que je n’ai rien
Je déteste quand quelqu’un marche au même rythme que moi
Je ne dis jamais : il est brillant
Je bois un verre
Je veux le verre pas le liquide à l’intérieur
Je n’ai aucune compétence
Je mange des beignets
Je dis : j’ai compris
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Je ne suis jamais tombée sur le coin d’une table quand j’avais deux ans
Je n’ai jamais saigné du visage
Je ne suis jamais tombée sur un muret quand j’avais onze ans
Je n’ai jamais saigné du mollet
Je pense à ta mort et à la mort de tout le monde parce que tu as acheté des nouvelles chaussures que tu es content et qu’elles sont moches
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(Photo Francesco Ungaro, Pexels)