Faux janvier

L’hiver les poivrait

aux narines frétillantes

poignantes giroflées

.

jamais mes hiers

.

***

Khamsine

.

Vent d’avril violent

marchand de sables orange

asphyxieur de Sphinx

.

rabotait mes big-bangs

.

***

Flamboyants

Ces scouts secs pétaient

leurs rouges matés de sable,

en rang sur la route

.

vieux et j’en pleurais

.

***

Sham-en-nessim

j’y trouvai le nom

de la tiédeur or de mai

étreinte d’enfant

.

et bénis nos siècles

.

***

Souq

Juillet ce tout jaune

sous les sabots lents des ânes

fruite la poussière

.

comme où je naquis

.

***

Aswan

Draps lavés au Nil

brûlent vos mains et j’enrage :

même Râ ignore

.

nos vraies pharaonnes 

Laure-Anne Fillias-Bensussan

Laure-Anne Fillias-Bensussan

Déracinée-enracinée à Marseille, Europe, j'ai un parcours très-très-académique puis très-très-expérimental en linguistique, stylistique, langues anciennes, théâtre, chant, analyse des arts plastiques, et écriture. Sévèrement atteinte de dilettantisme depuis longtemps, j'espère, loin de l'exposition de l'unanimisme des groupes de réseaux, continuer à explorer longtemps la vie réelle et la langue, les langues. Reste que je suis constante dans le désir de partager, écouter, transmettre un peu de l'humain incarné au monde par l'écriture ; la mienne, je ne la veux ni arme militante, ni exercice de consolation, mais mise en évidence de fratersororité. J'ai publié deux recueils de poèmes, écrit une adaptation théâtrale, participé à la rédaction de nombreux Cahiers de l'Artothèque Antonin Artaud pour des monographies d'artistes contemporains ; je collabore aussi avec la revue d'écritures Filigranes. - En cours : deux projets de recueils de courtes fictions, et d'un recueil de poèmes.

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    8 Commentaires

    • Dorio dit :

      Dans le souk Ra et Pharaonne rivalisent avec Sphinx en apnée Un âne passe marchand de sable et de photos instantanées « Jamais mes hiers » Narines poivrées

      • Laure-Anne dit :

        Voici le muezzin matinal qui échote aimablement à mes vieilles photos, que Râ et Allah le remercient de ma part !

        • Ariane Beth dit :

          Des polaroids que l’on contemple bien plus longtemps que la minute trente dont tu parles dans ta présentation, tant chaque mot et chaque image suscitent d’échos. Souvenirs de moments précis, mais ouvrant sur l’universel : c’est ce que je ressens en particulier avec l’odeur persistante des giroflées ou la magistrale évocation de la puissance du vent. Et quant au dernier polaroid sur les « vraies pharaonnes », il m’enchante, et me donne envie de saluer toutes les femmes qui entretiennent le monde et la vie, dans le chaos provoqué par ce que Laure Peytavin appelle dans un livre « Le coût de la virilité ».

    • Sophie Chambon dit :

      Sensible à ces évocations sensuelles et colorées, plus charnelles qu’archéologiques, j’ai voulu rendre hommage à ce format court auquel tu t’es adossée mais le bref n’est pas mon fort. Sans aucune connaissance de la réalité de ce pays, hormis des chromos ou clichés de cinéma voici:

      Le nez caressé
      Fragrances vagabondes
      Felouqu en caval.

    • André Bellatorre dit :

      On lit avec plaisir ces haikus saisonniers qui se seraient déplacés du côté des pharaonnes.
      De belles pièces d’orfèvrerie poivrées…

    • Pierre Hélène-Scande dit :

      Khamsine.
      Le signe kh note un son [re]
      dur. Il râpe la gorge
      et l’irrite comme une goulée de sable.
      Dans les yeux aussi : asphyxie du regard.

      • Laure-Anne dit :

        Khamsine veut dire 50 et c’est le nom du vent qui se lève du désert 50 jours avant Pâques, qui saupoudre tout de jaune dedans et dehors mais il est pris assez amicalement : cette période s’appelle « sham en nessim » : ça sent le printemps…

    • Pierre Hélène-Scande dit :

      Cette correction m’est utile. En effet, lorsque j’étais enfant en Côte des Somalies, le nom khamsine désignait un vent dont les grains de sable fouettait la peau et les yeux. Il n’était pas de bon augure.

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