« C’est en méditant sur l’ambition que je parlerai de tous les succès éphémères qui peuvent imiter ou rappeler la gloire ; mais c’est d’elle-même, c’est à dire de ce qui est vraiment grand et juste, que je veux d’abord m’occuper. »
(G de Staël. De l’amour de la gloire)
Le mot important est imiter. Il donne le critère du parallèle que Germaine établit entre l’amour de la gloire et l’ambition. Les deux procèdent du même désir mais la seconde n’est qu’une pâle imitation du premier, sa contrefaçon.
L’orgueil qui sous-tend ces deux passions n’est pas condamné au plan moral. Mais problème : le désir de reconnaissance qui les caractérise vient contrarier le bonheur.
« Je ne cherche point à détourner l’homme de génie de répandre ses bienfaits sur le genre humain ; mais je voudrais retrancher des motifs qui l’animent le besoin des récompenses de l’opinion ; je voudrais retrancher ce qui est l’essence des passions, l’asservissement à la puissance des autres. » (De l’amour de la gloire)
L’asservissement à la puissance des autres va ainsi servir d’échelle pour classer les trois déclinaisons de l’orgueil.
En haut, l’amour de la gloire, qui, dit Germaine, « est aussi rare que le génie, et presque jamais il n’est séparé des grands talents qui font son excuse. » Des talents qui portent à leur mise en œuvre. Cette passion est donc active, elle recherche un effet réel et « ne peut être trompée sur son objet ; elle veut, ou le posséder en entier, ou rejeter tout ce qui serait un diminutif de lui-même. »
Un cran (parfois plusieurs) au-dessous, l’ambition.
« Par l’ambition, je désigne la passion qui n’a pour objet que la puissance, c’est à dire la possession des places, des richesses ou des honneurs qui la donnent » (De l’ambition)
Résultat l’ambitieux « a besoin de la première, de la seconde, de la dernière place dans l’ordre du crédit et du pouvoir, et se rattache à chaque degré, cédant à l’horreur que lui inspire la privation absolue de tout ce qui peut combler, ou satisfaire, ou même faire illusion, à ses désirs. »
Cette accroche à la moindre parcelle ou même apparence de pouvoir signe la médiocrité de l’ambitieux. Et son illogisme : la soif de pouvoir pour le pouvoir aboutit à un asservissement à la puissance des autres de le lui donner ou refuser. On a ici la clé du comportement démagogique (je dis ça je dis rien).
Au bas de l’échelle enfin, l’orgueil sous sa forme de vanité. On verra la prochaine fois avec quelles verve et pertinence Germaine l’analyse.
Crédit image : Gallica (gravure de Laugier d’après la peinture de Gérard)
« l’essence des passions, l’asservissement à la puissance des autres », c’est limpide et édifiant, de quoi s’occuper un moment avec soi-même, avant même de s’occuper de nos abhorrés démagogues…
Mais quelques passions, comme l’avidité, pourraient en être exclues, ressortissant plutôt aux angoisses régressives de manque ? à voir….
On peut en effet se poser la question. Des éléments complémentaires aideront (peut être) à poursuivre la réflexion en ce sens au n°9/10 (si c’est pas pitcher, ça …)
« l’essence des passions, l’asservissement à la puissance des autres », c’est limpide et édifiant, de quoi s’occuper un moment avec soi-même, avant même de s’occuper de nos abhorrés démagogues…
Mais quelques passions, comme l’avidité, pourraient en être exclues, ressortissant plutôt aux angoisses régressives de manque ? à voir….