YOU(N) And THE NIGHT AND THE MUSIC
So I am
Same girl….
https://www.youtube.com/watch?v=SfDD7ayVWZo
Youn Sun Nah est une personne rare.
Elle nous avait bouleversé dans son auto- portrait So I am, sorti en 2004. La beauté de sa voix et de sa musique naissait de la rencontre inouïe entre cultures, mémoires et imaginaires étrangers qui refaisaient un nouveau monde, démontrant la force d’ un folklore universel.
Interprète pleine de sentiment de sa propre partition, qu’elle allait jouer sur toutes les scènes, elle continua patiemment sa route, dans les albums qui suivirent, souvent sur le label allemand Act, Voyage ( 2008), Same Girl (2010), Lento (2013), Immersion(2019) avec ses compagnons de route, dans une entente plus que «cordiale», une osmose véritable.
Elle chante toujours, entre souffle et cri, ne ménageant pas les écarts, avec une grande rigueur, jouant du silence, avec de fausses suspensions précédant de rauques déchaînements. Car du tempérament, assurément, la chanteuse n’en a jamais manqué : à l’époque où l’on révérait la prêtresse islandaise, « l’ultra-terrestre » Björk, elle aussi ressemblait à une étincelle de glace.
Devenue diva, à des capacités vocales toujours rares, elle a ajouté le talent de prendre son public à revers, invariablement. Son répertoire «cousu main» voyage du latin jazz, jazz brésilien («Frevo» de Gismonti), au blues, à la pop, au hard rock comme dans son «Enter Sandman» de Metallica. Ce qui n’a rien de surprenant quand on sait ce dont elle est capable, de ses éclats sauvages, d’une farouche énergie, animale, d’ un investissement total. C’est dans ses envolées que sa timidité manifeste disparaît, elle est musicienne avant tout, avec cette gestuelle qui la fait ressembler à une instrumentiste.
Qu’elle choisisse de reprendre un traditionnel coréen, “Kangwondo Arirang”, l’ inattendu «Jockey Full of Bourbon» du râpeux Tom Waits ou le «Calypso blues» plein de charme du suave Nat King Cole, Youn Sun Nah peut tout faire. Justement, on pourra lui reprocher de balayer large, mais elle scate ou swingue à sa façon, loin de la norme, donne de la forme aux sons, du relief aux phrases, retourne à l’innocence dans la réappropriation des mots.
Quand elle s’attaque à “My Favorite Things”, accompagnée d’une seule sanza, achetée dans un magasin de musique parisien, les paroles insignifiantes de cette bluette, prennent soudain un sens tout autre. Et quand elle chante en français, elle est tout simplement étonnante, dans sa version pudique de “La chanson d’Hélène”, écrite pour la lumineuse Romy Schneider ou dans cette audacieuse version d’ “Avec le temps”. Elle apparaît d’une sincérité désarmante, montrant un visage sans fard. Car l’émotion n’est jamais feinte quand Youn Sun Nah chante. Ainsi tracent les étoiles.
Peut-être faut-il l’écouter plutôt en live… Je n’avais pas accédé à la belle authenticité dont tu parles en écoutant Lento…j’entendais des effets… il me faudra sans doute le réécouter…
Mon oreille bien classique a du mal à trouver vraiment plaisir à cette écoute, mais ton texte m’enseigne et communique ta passion : un vrai bonheur de lecture !
Merci de votre retour généreux à toutes deux. Youn Sun Nah n’ a pas choisi le classique mais elle a une solide formation de chant. Quant aux effets, oui, il y en a mais que je trouve toujours justes. Et en français, selon les paroles, elle partage avec le public son émotion, pudique mais non contenue…
Merci de m’avoir fait découvrir cette chanteuse originale. J’ai particulièrement apprécié grâce à ta lecture My favorite Thing et Incertain water