Salon de Provence
Assis dans la petite cour je mange
le raisin qui pousse sur ma tête
ma grand-mère se lève et je mange
les figues qu’elle m’apporte
Elle me parle d’autres figues
de celles de sa terre kabyle qu’ils posaient sur une large pierre plate et recouvraient de feuilles
elle me parle de son père qui dormait à côté de la pierre pour qu’on ne vole pas les figues sous les feuilles
je mâche et j’écoute
aujourd’hui dit-elle les figuiers ne donnent plus
car on veut bien manger le fruit mais pas soigner l’arbre
j’approuve en silence
dégustant la galette de sarrasin que ses mains ont pétrie
Nel treno
Les trains étant moins chers ici que les hôtels
la nuit il traverse des terres
sans rien voir ni retenir
Et ça lui va à lui
d’être le pire des voyageurs
de boire partout sa bière allemande le matin son café à deux sous
jean troué t-shirt portant le nom d’un pays où il n’est pas allé
Plus tard
n’ayant aucune photo prouvant le contraire
il aimera se dire que tout cela n’était qu’un rêve ordinaire
un sogno noioso
Lecce
Piogia gioia
enfin je pleuvais ce soir et c’était doux
piogia gioia
je pleuvais ma pluie joie sur les Pouilles
sur les rues jaunes de Lecce
les passants couraient criant piogia et je pensais
je laverai Lecce je laverai Lecce
ses façades cumines
Meteora
J’en ai soupé de cette farine pour astronautes
le pain du peuple des glaces
le pain qui tient au corps comme mon arrière-grand-père à qui je dois mon nom disait voilà
une tranche pour aller aux champs
cendres d’un soir le vent se lève j’ai les cheveux dignes d’Alban
et malgré ma bouche close ce goût de suie de terre à sel
le vent se lève et ma toile aux abois
colle à ma face comme un suaire
Leonidio
Crâne de chèvre devant la face
il distingue les saveurs de pâturages
le thym d’Arcadie et au Nord
l’herbe grasse réchappée au déluge
aussi la bouchée arrachée en chemin
un jour au seuil d’une église
goût de dieu
Tsitalia
I’m probably happy
probably hard to tell
I don’t even know how to pronounce my name
now I say that’s up to you me
I’m probably happy
with your choice and other things to come
ignorant of my palm’s lines
following maybe the wrinkles on my neck when I throw back my head to see the wild geese’s flight