Être artiste
Après avoir exposé en Afrique du Sud et à Paris, Isabelle Valode s’arrête pour quelques jours dans la Galerie 66 tenue par Catherine Aerts à Périgueux en Dordogne. Cette dernière m’ a appris qu’Isabelle avait étudié l’histoire de l’art à l’École du Louvre, puis, cinq ans plus tard, les techniques du dessin et de la peinture auprès d’une artiste, Marion Dechamps. Cet intervalle entre les leçons théoriques et l’apprentissage pratique correspond à une période de réflexion à l’issue de laquelle Isabelle Valode est arrivée à cette conclusion : « Ce qu’il me faut, ce n’est pas étudier mais faire». Et Marion Dechamps n’a pas été seulement sa professeure mais son maître. Lorsque je lui demande quelle est la différence, Isabelle me répond : « Le professeur vous apprend des techniques pour créer. Le maître, lui, fait que vous vous sentez autorisé à faire : grâce à lui vous osez créer. » L’artiste me prend alors par le bras et me conduit devant quatre pastels pendus sur la vieille pierre de la galerie dont les murs remontent au XVIIe siècle.
Isabelle Valode : Regardez ces pastels, je les ai composés en commençant par feuilleter des livres d’art : lorsque un motif ou une structure arrêtait mon attention dans un tableau de Bonnard ou de Picasso, par exemple, je l’utilisais comme point de départ pour produire l’un de ces pastels. Mais je prenais soin d’en effacer l’aspect figuratif s’il en avait un, ne retenant que la force d’une couleur ou d’une forme, ou la dynamique d’un contraste. Feuilleter les livres d’art, visiter les musées, me nourrir des créations des autres, c’est une démarche que j’ai apprise auprès de Marion Dechamps auprès de qui je me suis formée pendant quatre ans. Je l’ai même accompagnée à la fin de sa vie : elle vivait dans un deux-pièces tout en haut d’un vieil immeuble parisien, une pièce était la chambre, l’autre était l’atelier-bibliothèque dans lequel Marion m’invitait à regarder les livres d’art , à m’imprégner des œuvres des maîtres, non pour les copier mais pour y puiser la force et l’envie de créer à mon tour.
Mais vous, vous avez pris la voie de l’abstraction, lui fais-je remarquer.