ANDRE JAUME
Retour aux sources
Absilone/Socadisc
http://label-durance.com/cd-retour-aux-sources-andre-jaume.html
Concert pour la sortie du CD, le 23 mai à Château-Arnoux (04)
en écho au festival du Fort Napoléon où André JAUME a souvent « tenu l’affiche ».
(Affiches de J.P. GIACOBAZZI )
Si le jazz conserve sa pertinence en ces temps de “distractions musicales”, c’est grâce à des gens comme André JAUME qui s’y ressourcent continuellement. “
Le peintre, dessinateur, critique-historien du jazz Jean Buzelin (1) a presque tout dit avec cette phrase qui résume le parcours rigoureusement intègre, sans renonciation aucune, d’un musicien poly-instrumentiste (clarinette, flute, saxophone ténor) et peintre à ses heures (2), créateur et enseignant d’une des premières classes de jazz, au conservatoire d’Avignon. Il s’est consacré à une musique, le jazz free qu’il a traversé dans son évolution et qui lui a conféré liberté, sens de l’engagement sans renier la clarté de l’articulation et du phrasé.
André Jaume a pu être considéré jadis comme un musicien voyageur-les titres de beaucoup de ses compositions (« Borobodur », « Marratxi », « la Casamance ») marquent une géographie humaine, une errance musicale qui n’a rien de touristique. Depuis qu’il s’est fixé en Corse, André Jaume n’en finit pas de reprendre son périple, à présent imaginaire avec ses instruments. Lui qui a toujours privilégié l’échange dans toutes les combinaisons possibles (3) et le dialogue complice (Raymond Boni, Steve Lacy et surtout Jimmy Giuffre, son mentor), sort sur le label sudiste ami, Durance, installé dans les Alpes de Haute Provence, un solo intitulé pertinemment « Retour aux sources », dédié à son ami, autre soufflant Joe Mc Phee, frère d’armes et de son, défini par l’ampleur de la voix, la fascination du chant, l’expression libre à laquelle il se réfère depuis Nation Time, un de ses premiers albums paru en 1970.
Ce deuxième solo de la collection, est aussi le deuxième du saxophoniste, après le fondateur « Le Collier de la Colombe », sorti en juin 1971, sur le label varois, C.E.L.P, disparu aujourdhui. Une première alors pour un saxophoniste français qui fut un pionnier dans le développement de cette musique de jazz. Et il serait bon que l’on en garde aujourd’hui une mémoire un peu plus vive.
Voilà un exercice de style au ténor, variant les nuances et atmosphères de son instrument, que ces douze petites pièces de sa composition et un arrangement sur un thème du grand William Breuker, pas vraiment faciles, qui engagent avec nous un dialogue fécond. La position de l’instrumentiste peut s’avérer délicate pour le souffle ( à quatre-vingt printemps tout de même!), difficile à garder de façon satisfaisante, avec cette dimension narrative appuyée et évidemment émotionnelle. Un récital sans esbroufe, art de compositions vives, libres, subtiles, servant de base à des improvisations souvent fougueuses et colorées, qui nous réconcilient, si besoin était, avec la complexité des sons et rythmes libres. On se laisse bien volontiers entraîner par cette déferlante avec son “Dinky Toy” qui évoque plus un oiseau (per)siffleur que l’on tenterait vainement de suivre sur les cimes de son chant, alors que la douceur de “Song for Estelle” conduit à une rêverie, tout autre.
Le saxophoniste a saisi la chance de se portraiturer une fois encore, dans une nouvelle aventure musicale. Qu’il est bon de s’abreuver à cette source fraîche du jazz, éternellement désirante…car ce n’est pas seulement un écho nostalgique à quelque chose qui fascina jadis, mais un travail patient de transmission qui prend tout son sens aujourd’hui. Une sorte de discours sur la lisibilité du temps.
(1) Jean Buzelin a créé en 2001 une affiche-clin d’oeil à la figuration narrative et … à l’empereur,
pour le formidable festival de la Seyne. Et je me souviens tout particulièrement du concert du vendredi 3 août, Liberté surveillée….
(2) André Jaume a en effet accompagné au long des trente six ans du festival par sa présence musicale, graphique, présent sur les deux fronts en 2012.
(3) Jean Pierre Jullian et Rémi Charmasson ont accompagné André Jaume dans ses tournées en Chine, au Mexique, en Amérique Centrale et aussi en France et en Europe. Une vieille histoire de transmission et d’amitié ….
Bel extrait audio, à ne pas manquer.
Oui, cette fois j’ai écouté avant de parler et tout en lisant… et du coup, oui, contente du voyage !!
Quel joli son, chaud et croustillant comme un vrai croissant! Et oui, ça souffle, on entend, on se brûle : héchô mais hébon!!