C’est en Syrie, dans la ville sainte de Gadara, que naît vers 140 av. JC notre poète, Méléagre. Sa vie n’est pas connue au delà des quelques allusions, qui peuvent aussi être des rêves, que fournit le poète au cours de son œuvre poétique, et la Suda, qui fait la somme des connaissances antiques, n’est pas l’indice le plus fiable de son existence. Il semble que le poète ait partagé sa vie entre deux villes, Tyr d’abord, où il reçut une instruction de qualité, puis à Cos, où il est peut-être mort du grand âge vers 60.
Son œuvre est épigrammatique et c’est tout dire que de rappeler qu’il n’y a pas, en Grèce, comme à Rome, un genre de l’épigramme – brièveté, saillance et pointe finale n’en sont pas encore les piliers. Car moins qu’un genre, l’épigramme est une forme poétique où la liberté de ton rencontre la brièveté ; faire court, seule exigence1. Quant au fond de l’affaire, disons qu’elle ne se limite pas au thème que préfère notre homme. Si l’amour l’occupe dans la plupart de ses poèmes, il fut aussi l’auteur d’épitaphes tristes et d’inégal intérêt.
Héliodora…et les autres
Qu’importent donc les deuils, Méléagre ne s’illustrant guère dans l’exercice un peu contraint des épitaphes. A l’exception de son propre cercueil, aucune tombe ne porte de poème signé par lui qui vaille d’être rappelé, sinon en passant. C’est dans l’amour que ses accents sont les plus francs et ses vers les plus touchants ; Héliodora, son amante, sa favorite, est l’objet de bien des séductions. Le charme, l’affliction, le désespoir, le mépris, tout y passe quand il s’agit de cette courtisane pour laquelle il s’est commis.
Il ne faudrait pas croire pourtant qu’Héliodora fût seule et que son sexe reçut à l’exclusion de l’autre ses preuves d’affection. L’épigramme érotique est rarement orientée dans l’unique direction du beau sexe et Méléagre, comme ses émules, participe de la «Muse garçonnière», où l’on chante l’amour des mâles Aphrodites..