Un auteur chinois nommé Hong Zicheng, qui vivait au XVII° siècle, a écrit un recueil d’aphorismes intitulé Propos sur la racine des légumes.
L’aphorisme, j’en aime la brièveté. C’est le genre de truc qui vous livre vite fait bien fait une nourriture agréable et légère.
L’aphorisme est au traité de philosophie ou au roman-fleuve ce qu’une tomate-mozzarella est à un cassoulet forêt-noire (et encore je passe les entrées et le plateau de fromages).
Quoique. Ces brièveté et légèreté sont trompeuses. Au fur et à mesure de la dégustation de l’aphorisme, on s’aperçoit que finalement on ne va pas être dispensé d’épluchage, de découpage, de malaxage, de mijotage, de marinage.
Ce quoique me convient. L’aphorisme stimule un certain goût de l’interprétation indéfinie, du ou bien ou bien, du inversement peut être que tout autant …
Du coup évidemment côté auteur c’est une forme littéraire difficile à pratiquer. Qui pour tout dire ne souffre pas la médiocrité. Mais vous verrez que, sans être le Nietzsche du Gai savoir, Hong s’en sort plutôt bien.
À part ça qui était-il cet Hong ? Un lettré, un sage s’adonnant à l’étude et à l’écriture. Je ne sais s’il était vraiment une grosse légume. Mais il est clair qu’il avait en tous cas suffisamment de radis pour mener sans souci matériel une vie consacrée à livrer les fruits de sa réflexion.
Allant visiter son potager, je n’y ai pas trouvé que des navets. Ça ne m’aurait pas déçue, d’ailleurs, car j’en apprécie le goût aigre-doux.
(Bon après y a la consistance faut pas qu’ils soient filandreux on est d’accord).
Bref je vous propose pour les articles à suivre une dégustation de racines de légumes à la façon de Monsieur Hong, accommodés sauce Ariane.
Image congerdesign (pixabay)
Contente et curieuse de croquer de l’aphorisme chinois, moins amer que celui de Cioran j’espère.
C’est drôle que tu mentionnes Cioran, car j’ai écrit aussi un parcours sur lui : en fait son désespoir est si outré que ça produit en moi l’effet inverse, et j’ai envie de « le prendre à la rigolade ». On verra ça plus tard (ou pas). Pour l’heure les chinoiseries inspirées d’Hong ne casseront pas trois pattes à un canard (laqué) mais bon, ça fait toujours un peu réfléchir, j’espère …
Chères mesdames, Cioran a été commenté toute la semaine dernière sur FC, et les éclairages sur son rapport à Dieu m’ont surprise et intéressée ! je ne peux pas dire cependant qu’il me fasse beaucoup rire.
J’ai du mal, je l’avoue, avec le tranchant de l’aphorisme, que peu se donnent la peine de malaxer et qu’ils se contentent de citer pour asséner leur façon de penser. « Tenez, prenez-vous ça dans la figure! » Et une fois qu’on a pris la bêche en travers du portrait, on n’a plus forcément le goût de malaxer…
Néanmoins les navets, radis et autres céleris ou fenouils de Monsieur Hong me tentent fort, avec ou sans couac de canard!
Je nous souhaite bon appétit!
Merci de venir t’asseoir à ma modeste table, chère lectrice.
Quant à Cioran, je ne le savais pas à la mode. Sans doute l’époque résonne-t-elle à son pessimisme. Et il se peut que mon rire soit juste un rire de défense, dirait Papa Freud.