« On est de son enfance comme on est de son pays ». Saint-Exupéry. Terre des hommes.
Une parole simple qui recouvre la complexité de l’être devenu adulte, selon son origine, son appartenance, son évolution, et qui invite à mettre à jour les racines fondamentales d’un aujourd’hui riche et mouvant. Je pars à la rencontre de ce qui m’unit à mes communautés de vie. Surgissent les premiers émois, ceux de la petite enfance, de l’enfance, qui ont tissé un maillage dans lequel mon présent tente de retrouver les saveurs, les bonheurs, les entailles douloureuses qui n’appartiennent qu’à moi. S’y mêlent traditions, contingences, préceptes du grand groupe.
A quelle croisée de ces chemins multiples vous trouvez-vous?



L’enfance est à la fois terreau fécondant et chimie polluante du reste de la vie… le dosage varie selon la chance de chacun. Quant à moi je fus chanceuse quant à la proportion.
Oui, c’est un terroir intérieur, l’enfance, en particulier pour ceux qui furent tôt déracinés ou héritent d’un déracinement très vieux très saignant…on y retourne cueillir comme fruits les images, les paroles, les chansons, et se faire pousser l’imaginaire d’aujourd’hui et demain..
J’aime les mots que tu as choisis, terroir terreau, qui forment un écho avec déracinés, belle approche, avec en fond l’intime.
Cette phrase est très belle, et fait réfléchir je trouve aux responsabilités des éducateurs, parents et autres, qui façonnent pour l’enfant la géographie de ce pays.
Et puis pour répondre à la question je ne peux m’exprimer qu’à partir de mon état de vieille, ou vieillissante disons. J’éprouve une certaine proximité entre mon mode de vieillissement et l’enfance. Je ne parle pas du désagréable « retomber en enfance » (comme si être enfant était déchoir). Je veux dire que ma vieillesse est enseignée par l’enfance, au sens d’attitude de disponibilité, de présence au présent. Attitude qui a été si peu mienne durant l’essentiel de ma vie d’adulte. Vieille, je me re-trouve enfin chez moi.
Quel éclairage, quelle sagesse bienvenue qui prolonge la citation au delà de sa temporalité initiale. Merci Ariane.
A propos des éducateurs irresponsables, cette réflexion effrayante de Burrhus – lui-même précepteur malheureux de Néron, dans la tragédie de Racine, Britannicus – au sujet de son élève, me semble avoir gardé toute son actualité :
« Dans une longue enfance ils l’auraient fait vieillir »
Une extension intéressante, merci Jean Marie.
Oui c’est intéressant de mettre en regard les deux aspects possibles de l’enfance : l’aspect positif de terreau créatif et de présence libre au monde, et son envers négatif qui se nomme plus justement « infantilisme », un mode d’être tout en irresponsabilité et en narcissisme. Et voilà que ça me fait penser à quelqu’un, vous voyez, ce bébé ubuesque devant qui le monde rampe, comme des parents démissionnaires devant un petit monstre capricieux. Décidément tu nous as offert une citation fort propice aux échos, Jacqueline …
Merci Ariane, c’est l’écho de la lecture qui la fait résonner à sa dimension, qu’il en soit ainsi pour toutes les citations, hâte d’en déguster d’autres…
L’enfance, c’est parfois un pays que l’on a quitté, et qui, comme il était, n’existe plus. Mais quelque chose en soi demeure, et c’est toute une histoire, pas forcément heureuse, mais c’est de ce pays-enfance-là que nous sommes, au moins pour partie.