« Le problème avec le monde, c’est que les gens intelligents sont pleins de doutes tandis que les plus stupides sont pleins de confiance » – Charles Bukowski
L’effet Dunning-Kruger, mais c’est quoi donc ?
En 1995 est retransmise au journal télévisé l’incroyable mésaventure du braqueur de banque McArthur Wheeler qui, dans un élan d’audace, fit le choix de commettre son délit à visage découvert.
Alors victime de sa propre logique le braqueur rapidement appréhendé s’est justifié comme ceci : son visage était supposé être invisible.
Partant de la réflexion qu’il est possible de faire de l’encre invisible avec du jus de citron, celle-ci ne devenant visible qu’après contact avec une source de chaleur, Wheeler, convaincu du bien fondé de ses connaissances scientifiques, s’est recouvert le visage de jus de citron et s’en est allé un sourire béat sur le visage, comme l’attestent les vidéos de surveillance, commettre son larcin.
Il aurait par ailleurs déclaré aux autorités sceptiques sur son état mental avoir testé au préalable sa méthode, à l’aide d’un polaroid et son visage n’apparaissait sur aucun cliché.
Cet événement inspira en 1999 deux psychologues, David Dunning et Justin Kruger.
Ceux-ci publièrent cette année-là une étude reposant sur 4 tests portant sur des sujets divers à destination d’étudiants, étude dont le but était l’auto-évaluation.
Au cours de ces tests les étudiants devaient premièrement jauger leurs aptitudes en lien avec les tests, puis juger de leurs résultats par rapport autres participants.
Les résultats de ces évaluations ont démontré que d’une part les étudiants ayant moins bien réussi le test avaient tendance à se surévaluer et inversement les élèves aux scores bien supérieurs à se sous-évaluer.
De cette étude est donc né le postulat de l’effet Dunning-Kruger qui définit la tendance qu’ont, d’une part, les personnes peu performantes dans un domaine à surestimer leurs capacités liées à ce domaine et, d’autre part, les personnes performantes à sous-estimer leurs facultés, ce que ne pouvons résumer comme suit :
L’ignorance engendre plus fréquemment la confiance en soi que ne le fait la connaissance.
Comment cela se produit il ?
Il s’agit d’un biais cognitif dû à des difficultés de métacognition ; c’est à dire à la faculté de pouvoir juger du bien-fondé de ses propres réflexions, ce qui engendre une surévaluation de ses propres compétences.
Attention : L’effet Dunning-Kruger n’a pas vocation à faire une comparaison entre personnes compétentes et incompétentes mais bien à analyser la capacité à se jauger soi-même.
Il est même possible de faire une application plus générale de cette observation en corrélant le niveau de compétence/maitrise d’une sujet à la confiance quant à ses connaissance personnelles.
Comme toujours nombre de corollaires découlent de l’effet Dunning-Kruger, un bien connu dans le monde du travail étant le principe de Peter, que nous appellerons ici « principe du placard doré ».
Celui-ci présente le postulat suivant « Dans une hiérarchie, tout employé a tendance à s’élever à son niveau d’incompétence », avec à son tour ce corollaire lui étant propre « avec le temps, tout poste sera occupé par un employé incapable d’en assumer la responsabilité ».
Une fois les difficultés de métacognition passées, sa fierté ravalée et un dur labeur effectué pour combler ses lacunes, il est aisé de prendre confiance et parfois même prendre la grosse tête mais comme toujours mieux vaut connaitre sa place au risque que l’on ne nous y remette.
Maintenant vous savez.
Références
- Justin Kruger et David Dunning, « Unskilled and Unaware of It: How Difficulties in Recognizing One’s Own Incompetence Lead to Inflated Self-Assessments », Journal of Personality and Social Psychology, vol. 77, no 6, décembre 1999
- Laurence J. Peter, Raymond Hüll, Le Principe de Peter, Paris, Stock, 1970
Corrolaires :
- Complexe de supériorité
- Principe de Peter
- Triade noire
- Rasoir d’Hanlon
- Loi de futilité de Parkinson
- Syndrome de l’imposteur
- Auto-efficacité
- Attribution causale
- Locus de contrôle
Unnecessary Knowledge, la pastille de connaissance inutile qui vous permettra de briller en société et d’épater même vos amis les plus calés.
La date de parution de cet article est bien choisie, parce que franchement ça fait poisson d’avril, le coup de ce braqueur !
Visiblement il a raisonné selon un des fondements de la pensée magique, la similitude : « si le jus de citron marche avec le papier, pareil avec la peau ». Là évidemment c’est très gros, mais ça peut arriver à tous, ça dépend de l’envie de croire à tel ou tel fait.
Le rapport avec l’aptitude à la métacognition, c’est à dire au fond à prendre de la distance, à se donner le champ nécessaire à une vision aussi peu déformée que possible m’évoque une belle phrase de Montaigne :
« Je ne m’aime pas si indiscrètement (= sans discernement) et ne suis si attaché et mêlé à moi que je ne me puisse distinguer et considérer à quartier (= point par point) , comme un voisin, comme un arbre. » (Essais livre 3 chap 8 De l’art de conférer)
En tous cas merci pour cet article, Luther, joignant comme toujours l’utile à l’humour.
S’examiner comme si on était un arbre, quel beau programme ! Mais pas forcément simple à exécuter. Je veux dire que déjà se lire les lignes de la plante des pieds, ce n’est pas si aisé, alors lire ses racines, quand elles s’enfoncent profondément dans la Terre… Bon, une fois de plus, je m’égare…
Disons plutôt que tu creuses la métaphore …
Je ne pas d’accord pour une fois avec le ton hautain avec lequel cet article reprend le sujet, car l’effet Dunning-Kruger n’a pas été étudié pour rabaisser qui que ce soit ; celui qui se risque à cela est probablement d’un autre genre d’incompétence que celui qu’il critique. Décidément le monde rêve de dessous et de dessus bien plus que de qualité. Cet article est presque un contresens. Le commentaire d’Ariane est agressif et plat. Le niveau baisse par ici, je me demande bien pourquoi… dommage, je ne crois pas que je reviendrai du coup, c’est décevant. A force de vouloir défendre absolument des mauvaises opinions on devient mauvais. Mais la prétention des faux savants est sans limite …
Épigone quand la création t’es inaccessible ! Tu suis bêtement le faux chemin en te croyant malin…
Enfin puisque vous êtes toujours d’accord entre vous, je ne voudrais pas vous contredire…