Du Panier à la Sierra Madre Occidentale

 Le dernier dimanche de septembre, pendant Les Correspondances de Manosque, la Fondation Carzou proposait une exposition de clichés de Bernard Plossu. Le photographe avait quitté le Panier de Marseille et les chemins de la Sainte-Victoire. Il allait marcher près de la frontière mexicaine. Il te suffisait de le suivre.

 

Au détour d’une rue, le moteur d’une vieille américaine vint chatouiller tes oreilles. Tu t’en allas. Quelques pas plus loin, tu te laissas séduire par le regard de braise d’une belle brune. Elle était vissée derrière les cymbales d’un orchestre, dans lequel elle devait jouer, depuis quelques années déjà. Tu repris ton chemin. Une autre femme t’apparut, en contre-plongée cette fois. Alors que tu contemplais son visage, tes yeux glissèrent sur sa coiffure dont la hauteur se révéla trois fois plus épaisse que ses poignets.

Mais bientôt, devant un écran qui diffusait des images en noir et blanc, un canapé s’offrit à toi. Après l’avoir longuement inspecté, tu t’y affalas pour voir défiler d’autres visages, les pas d’un planteur. La lune, posée dans le ciel blanc d’un matin de novembre, te laissa rêveur. Lorsque tu te redressas, ton regard plongea dans une vieille anglaise. Elle te transporta si loin que tu crus retrouver les Alpes. Il s’agissait de la Sierra Madre Occidentale. À peine le temps de te reprocher ton manque de culture, la décapotable te déposa au bord d’un lac. Là, ému par le sourire de deux jeunes motards, tu te surpris à admirer la couleur de l’asphalte. C’est ainsi que tu te retrouvas de l’autre côté de la frontière, dans les bas-fonds de la ville, entre un Burger Chef, un restaurant et un supermarket.

  Dans un bar, une adolescente en short offrait ses longues jambes devant le dieu flipper.
(Photo de cottonbro, Pexels)

2 Commentaires

  • André Bellatorre dit :

    Au fond chère Dominique ton personnage nous dit « suivez mon regard » et il nous nous fait son cinéma. On ne regrette pas ce parcours scopique et l’on est séduit par le superbe final.

  • Dominique dit :

    Merci André pour ce retour. Les parcours des photographes me surprennent toujours. Vissés derrière l’objectif, passant d’un sujet à l’autre, j’ai souvent le sentiment qu’ils ne peuvent voir la vie comme les autres, se mettent en scène et entraînent dans leur sillage les spectateurs de leurs expositions. Une voie beaucoup moins entrainante que celle que tu as su tracer devant ceux et celles qui ont eu la chance d’approcher la littérature avec toi.

Laisser un Commentaire

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.