(Seule une lecture sur grand écran rendra justice à la disposition des mots dans l’espace.)
pour Julie
J’ai cassé
deux belles
tasses
bleues et
blanches
il m’en reste
une seule
dans laquelle
je me sers
mon café
matinal
la gravité
des éclats
me frappa
doucement
je trace
du doigt
l’encens se diffuse
dans la chambre
tu rallumes
la mèche
sorcière
tu ne me quittes pas
je te
respire
des mots
tu te penches
sur des documents
juridiques
des actes
de naissance
de mort
des testaments
des comptes
bancaires
fiscaux
des revenus
des refus
des demandes
d’emploi
des lettres
aux magistrats
d’avocat
des preuves
faute de le dire
faute de le faire
marque nt
des gestes
attachés
aux mains
attachés
aux
manque nt
des actes
conscients
je me penche
sur le comptoir
de ta cuisine
ayant rempli
ton frigidaire
je m’apprête
à le vider
viennent
et partent
j’oublie
ton visage
pendant que
je me le remémore
un corbeau
se bat
avec une pie
gagne
me regardant
lacer mes baskets
à la porte
deux oiseaux
passent
je me demande
demande
à la fenêtre
je remarque
des ombres
te demande
un autre
jour
le ciel
une promesse
au-dessous
sur les planches
descendent
pardon
je cache
l’orgueil
mes mains
est
comme
un sentiment
je
qui
la tête
croit
il
est
dans
toujours
les mains
possible
dans tes
mains
on sait
repérer
c’est toujours
refaire
un jour
tu ramènes une cafetière italienne
tu l’as trouvée dans une brocante
bon marché
je suis étonné
elle est comme celle
que j’ai rapportée
le premier soir
le lendemain
je l’ai versée
dans deux
tasses
(Photo Metropolitan Museum of Art)
j’aime ce rythme qui ponctue les actes. On peut visualiser ces moments incertains.
Je ne peux pas ne pas aimer, il y a tout ce qui me parle. Merci pour cette petite danse verbale, cette petite pluie qui avance et remue dans tous les sens, pour finir dans un verre. Les documents juridiques font mal au cœur, oui, le beau « pardon » surtout, qui tombe.
Conceptuel. Il parle d’une réalité nue où l’espace fait les mots et les mots font l’espace.
La figuration des mots et leur construction dans l’espace me font penser à la magie d’ « Un coup de dés jamais n’abolira le hasard » de Mallarmé.