Sédiment bien gardé

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Un peu découragée par les résistances rencontrées, je voulais abandonner ces expérimentations car parfois, je ne parviens pas à trouver l’aquarelle finale. Puis à nouveau un regard quelques jours plus tard sur l’essai prometteur du début. Je me suis dit qu’en ayant recours au modelage tridimensionnel du support avant même la peinture, je pourrais obtenir un relief au service du mouvement de la couleur : des creux profonds pouvant accueillir le noir velouté, des auréoles claires avec une touche de rouille sur les bords qui remontent, différents types de surfaces granulées sur les hauteurs. Retour aussi à l’inclinaison du plan, redressant le support à la verticale après une première nuit de séchage afin de laisser couler l’excédent de liquide par-dessus les formes.

Ce sont en effet les aspects que j’apprécie une fois réalisé l’essai n°13 : les formes se répartissent agréablement sur le format, organisées mais pas trop régulières. Un lien invitant à des associations se crée entre les trois pôles noirs en bas du format. Puis il me semble difficile de mieux révéler la complexité de la couleur par le procédé en ce qu’elle donne à voir la fracture des particules selon des granulations variées, alliant des effets pointillistes, caillés ainsi qu’une impression de ruissellement. Les noirs sont profonds et parfaitement mats tandis que des auréoles rouillées se dessinent subtilement en amont de la formation de quelques contours bien marqués. Un imprévu heureux s’est également invité dans le procédé, sous forme d’une forte averse ayant traversé le toit de l’atelier estival. Des gouttes répétitives ont délavé des stries blanches que j’accueille fort volontiers dans l’équilibre de l’essai n°13 – qui devient de ce fait Tondo n°31.

Tondo n°31

Indépendamment du fait que cette aquarelle répond le mieux à mon intention initiale, elle m’intéresse également par le dialogue qu’elle entretient avec le corpus. Elle reprend une expérience de sédimentation longue entreprise à Marseille en 2011 pour l’Aquarelle 79, de coulures réalisées à Salzburg en 2014 pour la 98 et enfin une première approche de couleurs minérales pour Tondo n°14 en 2022 à Paris.

Si je m’arrête là, c’est aussi que je ne ressens plus de doute, aucun impératif intérieur qui me dirait de continuer, mais le plaisir à chaque fois renouvelé de voir qu’elle tient le regard.

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(photos © Gabriele Chiari)

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