P.H-SC : Y a-t-il dans la musique rap actuelle… A propos, vous employez le mot rap ou le mot hip-hop pour parler de votre musique ?

Mister Crown : Rap ! Le mot hip-hop désigne plutôt un courant culturel dans lequel on trouve non seulement le rap mais aussi le breakdance, le beatboxing, le graffiti… Et dans le rap, il y a plusieurs styles. Celui dans lequel je me reconnais est le grime, issu de la musique électro britannique des année 90 et de la musique jamaïcaine des années 80. Une de ses caractéristiques notable est l’accent très british des rappeurs.

P.H-Sc : Y a-t-il donc dans l’univers du rap des artistes qui stimulent votre réflexion sur la forme à donner à vos œuvres et sur les sujets à aborder ?

Mister Crown : Sur le fond , il y a deux artistes américains qui par les valeurs et les opinions qu’ils défendent m’ont profondément marqué. L’un est Kendrick Lamar, le premier rappeur à avoir obtenu le prix Pulitzer, et qui a ainsi donné ses lettres de noblesse au rap, que les gens regardent trop souvent comme un art pauvre. L’autre est Donald Glover, alias Childish Gambino, auteur de This is America dont le clip mérite vraiment notre attention ; c’est non seulement un rappeur mais aussi un acteur et le réalisateur de l’excellente série Atlanta, qui traite des difficultés des afro-américains aux Etats-Unis. Pour eux, dans le rap, le texte et la façon de le dire sont essentiels. N’oublions pas, à ce propos, qu’une étymologie fictive du mot rap comme acronyme de rhythm and poetry circule parmi les rappeurs. Pour ces artistes comme pour moi, le rap est un genre littéraire par lequel on peut propager ses idées et défendre ses opinions dans un langage simple et brutal, en un mot efficace.

P.H-Sc : Et pour la forme ?

Mister Crown : Du point de vue de la forme, l’album Man on the Moon de Kid Cudi a exercé sur moi une influence car il m’a donné l’envie de tenter des fusions entre le grime et des univers sonores complètement différents. Et le disque N°5 Collaborations Project d’Ed Sheeran, dans lequel ce dernier collabore avec plusieurs rappeurs m’a puissamment stimulé. Ecoutez cette œuvre, elle vous donnera envie de créer ! Je suis aussi sensible à des influences issues d’autres genres musicaux que le rap. Par exemple, j’aime beaucoup la danoise Agnes Obel qui écrit et chante des folk songs et je suis fan des Foo Fighters, le groupe rock de Dave Grohl ; et j’aime aussi la musique symphonique comme on peut le deviner dans Uncrowned.

P.H-Sc : Symphonique ? Vraiment ?

Mister Crown : Tout à fait ! C’est un goût qui s’est développé avec ma passion pour le cinéma*. Comme beaucoup de jeunes de ma génération, j’ai eu une première approche de la musique orchestrale dans les films de Spielberg et de Burton avec des compositeurs comme Hans Zimmer (Gladiator, Pirate des Caraïbes) ou Danny Elfman (Les Simpson, Desperate Housewives, la série animée des Batman, dont le générique m’a musicalement marqué.).

*Mister Crown a exercé les activités de caissier dans un cinéma et de critique de films.

P.H-Sc : Pour finir, je remarque que l’album Uncrowned reprend des morceaux présents dans Caligula

Mister Crown : Très juste ! Par exemple, dans Caligula il y a Fireflies (Lucioles) , et dans Uncrowned il y a Fireflies II, et dans le prochain album il y aura sans doute Fireflies III. C’est mon côté balzacien ! (Rires)

P.H-Sc : Pardon ?

Mister Crown : Oui, Balzac a inventé le retour des personnages d’un roman dans un autre. Moi, d’un album à l’autre, je pratique le retour des morceaux de musique, en les modifiant pour les adapter au nouveau monde sonore… (Sourire énigmatique)

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