Vert soleil
De toutes les couleurs, il se pourrait que le vert fût la plus mystérieuse
en même temps que la plus apaisante
Jaccottet, Cahiers de verdure, ‘Blason vert et blanc’
Les avant-soirées d’été font chanter les prés et leurs lisières de fougères. La qualité de leur vert lumineux, à ce moment précis et fugace de la journée, fait entendre qu’il s’agit là d’une couleur profonde, essentielle, et non point d’une parure de surface.
C’est un rayonnement qui sourd du cœur même de l’herbe et des feuilles. Il est d’une intensité extrême, et reste cependant doux, apaisant. Les prés, illuminés par le soleil déclinant (mais pas encore rasant, encore moins couchant), absorbent l’énergie de la lumière – énergie de feu ; ils l’assimilent, s’en nourrissent, la mêlent à l’énergie du bois, de l’eau, de la terre, puis la restituent, apaisée, vivifiante, en une réflexion verdoyante qui inonde les fins d’après-midi et qui me semble être l’acmé d’une belle journée d’été.
Et le corps, et les yeux, qui ont souffert de la méridienne incandescence, se laissent glisser dans ce bain réparateur de douce luminosité, s’y détendent, s’y lovent, s’y régénèrent.
Fragile instant de plénitude, durée suspendue où le mystère – celui d’une possible éternité ? – se glisse dans l’éphémère d’une verte lumière.