Mettre en scène Nostalgie 2175, comme souvent chez Anja Hilling, c’est s’interroger sur la représentation de la catastrophe. Ce monde de 2175 est irrespirable, au sens propre du terme – les températures sont exponentielles, la combinaison de protection est indispensable pour circuler à l’air libre, la peau humaine est partout et nulle part. Alors que les protagonistes ne peuvent se toucher, c’est le monde entier qui devient membrane puisque les murs proposés par Posch sont des matériaux à base de peau humaine.

Soleil noir

D’emblée, le texte m’a donné l’envie d’un dispositif scénographique davantage de l’ordre de l’installation, et où la question du vivant ou de sa trace, se pose avec intensité. Nous rêvons avec Clémence Kazémi, la scénographe, à un espace desséché où des éléments naturels pourraient reprendre leurs droits et envahir progressivement le plateau. Nous travaillons sur ce qui pourrait rester de la nature, en reprenant des principes de l’arte povera. Inviter des éléments organiques sur le plateau car c’est à mes yeux une incarnation plastique de cette pièce que je lis comme avant tout solaire – décider d’enfanter, naturellement, organiquement, dans un monde voué à sa perte. La question de l’image s’invitera aussi dans le travail pictural sur les corps.

J’ai l’envie, comme dans mes précédents spectacles, de travailler sur les corps des comédiens comme sur des tableaux ou des sculptures, en reconstituant certains motifs qu’il s’agisse des catastrophes – Le Radeau de la Méduse, Les écorchés de Michel-Ange- ou de l’imagerie religieuse – la pièce peut se lire comme une sorte de variation infinie sur les Noli me tangere et les Annonciations de la Renaissance. Taschko est peintre, dans la pièce, et travaille à partir d’un fond de cassettes VHS sur la mémoire collective du cinéma, et de films grand public comme confidentiels. Les scènes auxquelles la pièce fait référence sont d’ailleurs issues de Plein soleil, Dirty Dancing…. Ces références très larges, ancrées dans la mémoire collective, sont un axe de travail que j’aimerais poursuivre et développer, dans les corps, dans des images magnifiées, travaillées par la lumière et des filtres scéniques.

Synesthésies

Le travail sur la dimension cinématographique se poursuivra également, comme dans tous mes travaux, dans le code de jeu des comédiens. La dramaturgie obéit à une forme de théâtre-récit, alternant entre des scènes dialoguées, très concrètes entre les trois personnages et un flash forward qu’est la parole poétique de Pagona s’adressant à son enfant qui n’est pas encore né. On passe ainsi d’un mode de jeu très direct, très parlé, qui peut être très proche de celui de la Nouvelle Vague, à un récit-paysage immersif et atmosphérique où la langue se fera très précise, proche de l’oratorio poétique. La musique soutiendra ces variations – j’imagine un travail musical qui puisse passer d’ambiances bruitistes à des envolées harmoniques, là aussi pour donner à cette histoire à la fois son extrême contemporanéité et son atemporalité.

.

Calendrier :

Du 18 au 20 janvier 2022 Centre Dramatique National de Besançon-Franche-Comté (25)

Du 25 au 28 janvier 2022 Théâtre de la Cité – CDN de Toulouse (31)

Le 1er février 2022 Les Scènes du Jura, Scène nationale à Dole (39)

Le 3 février 2022 L’Arc, Scène nationale du Creusot (71)

Les 15 et 16 mars 2022 Espace des Arts – Scène nationale de Chalon-sur-Saône (71)

Saison 2022/2023 Théâtre National de Strasbourg (67)

.

.

.

Un Commentaire

Laisser un Commentaire

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.